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Le développement durable
Les actions humanitaires (IV) Dans le cadre du développement durable, la question humanitaire est certainement la plus urgente et la plus complexe. Si on ne considère que la question du niveau de vie des populations, on constate que la pauvreté dépend de facteurs politiques et socio-économiques qu'il est impossible de résoudre en quelques actions éclairs ou temporaires. De plus, les organisations humanitaires doivent se battre contre les mentalités, parfois les lois religieuses, les injustices sociales et des démarches administratives souvent décourageantes pour obtenir au final une fraction des résultats qu'ils espéraient. Le premier facteur à considérer est la question démographique. Aujourd'hui il naît chaque année 137 millions de bébés dans le monde ! Tenant compte d'une mortalité de 1.9 individu par seconde, la population active doit donc subvenir aux besoins de plus 2 nouvelles personnes toutes les secondes. Et la file des nouveaux-nés ne fait que s'allonger de manière exponentielle. Sans un ralentissement de cette croissance d'un facteur 100 dans certaines régions du globe (Asie, Afrique) et une relance de l'économie dans des secteurs d'avenir (haute technologie, services), nous allons tout droit vers des crises sociales avec un risque accru de dépression économique. Nous avons franchi les 6.1 milliards d'habitants en l'an 2000. Nous serons plus de 9 milliards en 2050 et nous devrions plafonner à 11 ou 12 milliards en 2100. Chaque année, près de 8 millions de personnes meurent dans le monde du fait de leur pauvreté dont près de 95% sont des enfants, alors que l'Occident croule sous les excédants alimentaires et se permet même de les jeter ! Cette situation immorale est révoltante et persiste depuis plusieurs générations sans qu'aucun dirigeant occidental n'y change un iota ! Ces 8 millions de victimes par an qui crèvent littéralement de faim à quelques milliers de kilomètres de chez nous représentent une personne toutes les 4 secondes, autant de victimes de la famine que nous aurions pu éviter si nous acceptions de sacrifier un peu de notre confort pour subvenir aux besoins de première nécessité des habitants du tiers-monde et bien entendu à ceux du quart-monde proche de chez nous. Ce n'est même plus un défi que d'essayer d'enrayer ces phénomènes, ce serait un miracle que de parvenir à résorber ces problèmes dans la conjoncture mondiale actuelle. En effet, si des associations comme le "Live Aid" (1985) du chanteur Bob Geldof peuvent rassembler plus d'un milliard de personnes et récolter environ 200 millions de dollars US autour d'une idée, elles n'ont aucun poids politique, si ce n'est indirectement à travers une prise de conscience collective. Ce sont les politiciens (et les industriels, les magnats, etc.) qui tiennent les cordons de la bourse. S'ils voulaient réellement le support de la population pour soutenir des actions caritatives d'envergures, le "Live Aid" leur a démontré qu'ils pourraient récolter l'argent dont ils ont besoin. The Lysistrata Project Album - Anita Roddick Images de la folie et l'indifférence des hommes
Mais en Occident les politiciens ne l'entendent malheureusement pas de cette oreille. Ainsi en Europe ou aux Etats-Unis, on accorde jusqu'à 2.5$ US de subside aux animaux d'élevage alors qu'on ne donne qu' 1$ US aux pays du tiers-monde ! Faut-il en conclure que nos dirigeants considèrent qu'un animal vaut plus qu'une vie humaine... ? Quel est le ministre ou le président qui a pris ce problème à bras-le-corps ? On les compte sur les doigts d'une main dans le monde et l'Europe n'est pas la première à montrer l'exemple ! Cette attitude est scandaleuse et nous devons tout faire pour changer nos attitudes, même si cela doit faire mal à certains politiciens et lobbies. Mais comparée à la souffrance qu'endurent les pays pauvres, ce ne sera jamais qu'un soupir de résignation, leur vie ne sera jamais en jeu comme elle peut l'être dans le tiers-monde. Malheureusement le sujet est trop vaste pour être abordé en quelques lignes dans cet article. Pour bien comprendre l'injustice qui frappe le tiers-monde, nous allons centrer notre discussion sur une seule question bien concrète, celle des médicaments et des soins de santé, dont nous savons combien ils peuvent être cher, même en Occident. Ici également les pays riches se dorent la pilule sur le dos des plus pauvres. Le tiers-monde : quand l'Occident se dore la pilule Elaborer un remède pour vaincre une maladie coûte beaucoup d'argent en frais de recherches et développements. Ce n'est qu'au bout de 10 ans parfois que le produit apparaît sur le marché, destiné quelquefois à quelques dizaines de milliers de malades seulement à travers le monde. Le rendement, le "retour sur investissement" cher aux commenditaires et aux actionnaires, peut donc être très faible et seules les "majors" sociétés pharmaceutiques avec le support financier des pouvoir publics (le budget accordé à la recherche) peuvent espérer trouver un certain bénéfice dans cette aventure.
Pour lutter contre les virus, il faut donc de l'argent, beaucoup d'argent (cf. les vaccins contre la Covid-19). Etant donné que l'industrie pharmaceutique ne fait pas oeuvre philantropique, elle ne s'intéresse qu'aux maladies les plus communes car elle espère ainsi obtenir un retour, des bénéfices, une fois le médicament commercialisé. Une solution pour poursuivre ses recherches et conquérir progressivement de nouveaux marchés est d'invoquer le risque de bioterrorisme. Le gouvernement ne peut pas y être insensible et le résultat est tout bénéfice pour la santé publique. Bien sûr tout abus peut conduire à la corruption et ce n'est pas le but de mes propos. Les étagères de nos officines occidentales débordant de médicaments, avec cette pléthore de remèdes en réserve beaucoup de personnes se demandent aussi pourquoi ne soignons-nous pas les malades des pays en voie de développement et sous-développés ? Nous disposons souvent des vaccins, il suffirait de transplanter les industries ou les pharmacies dans le tiers-monde... C'est d'autant plus vrai que certaines maladies tropicales pouvant être mortelles ne concernent que quelques milliers de personnes seulement et nous pourrions rapidement éradiquer la maladie et peut-être son vecteur. A cette question pertinente, un généticien ou un pharmacologue vous dira honnêtement mais à l'insu de son patron que les industries pharmaceutiques ne veulent pas "investir dans la brousse". L'argument invoqué est de prétendre d'une part que le marché ne rapporte aucun revenu et d'autre part qu'il sera conquis en quelques jours. Cela revient à créer une industrie très onéreuse en technologie et en main d'oeuvre pour un besoin qui n'existe pas proportionnellement aux problèmes que nous rencontrons dans les pays industrialisés. C'est vrai pour certaines maladies rares (orphelines) mais il est des pandémies qui mériteraient bien de délocaliser certaines entreprises, notamment le SIDA. En Occident, la recherche a trouvé le moyen pour que le SIDA ne soit plus transmis de la future maman à son enfant. En revanche, dans le monde, plus de 40.3 millions de personnes ont contracté le SIDA (2005) dont les deux-tiers vivent en Afrique subsaharienne. 750 000 personens sont contaminées en Europe et 700 000 en Chine. Aujourd'hui, un enfant meurt du SIDA toutes les 15 secondes ! Du fait que l'Europe a trouvé la solution à ce problème, cette recherche a pratiquement été abandonnée et on ne s'y intéresse presque plus. Seule la société de biotechnologie américaine Moderna travaille sur un vaccin contre le VIH mais, s'il s'avère efficace, il ne sera prêt qu'en 2030 au plus tôt. En d'autres termes, le problème du tiers-monde ne concerne plus les sociétés pharmaceutiques ! Aujourd'hui l'UNICEF est en train de se battre contre cette attitude révoltante des Occidentaux.
Mais l'industrie pharmaceutique est encore moins éthique qu'on le pense car elle est également capable d'organiser une pénurie de médicaments, comme on le constate de temps en temps avec certains antibiotiques, antihypertenseurs, des traitements contre le cancer ou la maladie de Parkinson, y compris pendant la pandémie de Covid-19 (où s'ajouta une mauvaise gestion des stocks au sein même des hôpitaux). En 2021, un cas défraya la chronique. La firme pharmaceutique sud-africaine Aspen faisait pression sur les ministères de la Santé des différents pays avec lesquels elle négociait dont l'Italie afin d'accroître davantage ses bénéfices. La Commission européenne ouvrit une enquête et Aspen fut contrainte de réduire de 73% le prix de ses médicaments anticancéreux et fut condamnée à payer une amende de 5 millions d'euros à ses clients italiens (cf. RTBF). Bref, pour certains grands laboratoires, la vie a un prix et la santé se monnaie sous la pression et au chantage ! Sans parler des retombées financières sous forme de bénéfices par action dont profitent leur CEO et hauts managers comme ce fut le cas lors du développement du vaccin contre le Covid-19. Albert Bourla, CEO de Pfizer vendit ses actions le jour de leur progression de 15%, ce qui lui rapporta 5.6 millions de dollars (cf. Business Insider). Même attitude pour les hauts managers de Novavax dont l'action (NVAX) passa de moins de 10$ en janvier 2019 à plus de 157$ en août 2020. Leurs gains combinés avant impôt s'élevait à 18.9 millions de dollars ! Mais il paraît qu'il n'y a pas de délit d'initié et que c'est tout à fait légal, même si ces bénéfices sont en partie alimentés par des fonds publics ! Ceci dit, les principaux bailleurs de fonds telle le Fonds Mondial aident heureusement tous les pays du tiers-monde dans leur lutte contre la pandémie de SIDA ainsi que celles du paludisme et de la tuberculose en collaboration avec les autorités locales. Depuis 2001 par exemple, le Fonds Mondial a pu récolter 4.7 milliards de dollars US pour financer ses activités jusqu'en 2008. Lors de ses deux premières séries d'octroi de subvention, le Fonds Mondial a engagé 1.5 milliard de dollars pour financer 154 programmes dans 93 pays. Comme le précise l'OMS, dans le cadre du développement d'un vaccin contre le Covid-19, il existe également des organisations mixtes comme la CEPI (Coalition for Epidemic Preparedness Innovations ou Coalition pour les innovations en matière de préparation aux épidémies), un partenariat public-privé qui finance des programmes de R&D, et les donations privées dont celle de la fondation Bill et Melinda Gates, Nestlé ou la banque japonaise Sumitomo Mitsui. Le Gavi (Alliance pour les vaccins) est également un partenariat public-privé mondial établi en Suisse. Il codirige le COVAX, l'organe qui effectue les achats et répartit équitablement les vaccins afin qu'ils ne soient pas réservés aux pays riches. Enfin, la Banque Mondiale prête les fonds aux pays pauvres qui souhaitent acheter des vaccins. Au total, la Banque Mondiale a prêté 12 milliards de dollars aux pays les plus pauvres en prévision de l'achat de vaccins contre le Covid-19. Ces fonds peuvent aussi servir à améliorer les infrastuctues publiques et notamment les routes de ces pays (cf. The Financial Express). Malgré ces aides, tous les pays pauvres avouent qu'ils manquent toujours de ressources, tant financières pour acheter les vaccins ou les médicaments que de bonnes volontés prêtes à les soutenir dans le cadre de missions sanitaires (Croix Rouge, Médecins Sans Frontières, Médecins du Monde, etc) ou éducative (UNICEF).
Mais il y aussi un envers aux bonnes intentions. Rappelons que lorsque les Etats-Unis ou l'Europe daigne envoyer des médicaments, notamment dans le cadre du programme ECHO de la Commission Européenne, il est arrivé plus d'une fois que la date de péremption était dépassée... Comment peut-on qualifier un tel geste ? Après avoir été considéré plus mal que des animaux (cf. ci-dessus), le tiers-monde serait-il également synonyme de poubelle aux yeux des Occidentaux pour qu'ils s'en désintéressent à ce point ? Le tiers-monde serait-il juste bon pour accepter nos déchets toxiques, nos vielles voitures, les carcasses rouillées de nos navires ou nos vêtements usagés ? Il est temps que nos dirigeants racistes et peu scrupuleux de l'état de la planète laissent la place aux jeunes élevés dans un monde cosmopolite et plus équilibré Pour en revenir aux médicaments, disons-le clairement, de façon générale cela n'intéresse pas les industries pharmaceutiques d'investir dans le tiers-monde car leur profit ne serait pas suffisant ou contrecarré par des lois protectionnistes locales. Pour vous donner un ordre de grandeur du coût exhorbitant de la mise au point d'un médicament, les investissements qui ont été nécessaires pour élaborer le vaccin contre la gastroentérite dont le rotavirus touche essentiellement les enfants en dessous de 5 ans, l'industrie pharmaceutique a dû investir une somme comprise entre 500 et 800 millions d'euros... Ce produit doit donc être rentable le plus tôt possible au risque de mettre à genoux ces industries spécialisées. En conclusion, les sociétés pharmaceutiques ne s'intéressent pas réellement à notre santé comme le laissent à penser leurs publicités, mais à notre portefeuille ! Telle est la dure loi du capitalisme dans une économie de marché mondial... Heureusement, dans divers pays du monde, des sénateurs essayent d'instaurer de nouvelles lois pour changer les politiques immorales édictées par l'Occident afin de réduire la fracture Nord-Sud. Aujourd'hui, notamment dans le cadre du développement durable, l'expression "ce que vous découvrez chez nous reste chez nous" est devenu d'actualité. Après plus d'un siècle de colonisation et de pillage, de plus en plus de voix s'élèvent pour crier haut et fort qu'il est grand temps que les pays victimes des blancs retrouvent santé et prospérité. Il y a en revanche deux disciplines qui intéressent de près les scientifiques et plus encore les industriels car elles sont riches d'enseignements et de profits potentiels : l'étude du génome et la génération des tissus (cellules souches, biogels, etc). Cela fera l'objet d'un autre article consacré au génie génétique. Sauvons notre maman, la Terre Dans tous les cas de figures, de la préservation des écosystèmes à la recherche d'énergies alternatives et la réduction de la fracture Nord-Sud, la balle est dans le camp des scientifiques, des industriels, des économistes et des pouvoirs publics desquels nous attendons tous des solutions et des directives. Nous sommes partant si leurs solutions sont économiques, dans l'intérêt général et surtout des plus pauvres, et si cela peut favoriser le développement durable. Depuis la conférence de Rio de 1992, la communauté internationale reconnaît que le développement durable est devenu un objectif prioritaire. Mais les changements d'attitudes sont lents car il s'agit de changer les mentalités de tous et d'agir dans une concertation à l'échelle planétaire, autant de principes qui ont de nombreux impacts (négatifs) financiers et économiques que beaucoup de dirigeants et de lobbies n'apprécient pas. Ainsi en 1995, au cours de l'Assemblée Générale de l'ONU, les représentants des gouvernements reconnaissaient que l'état général de la Terre s'aggravait et affirmaient "leur volonté de concertations et d'actions continues inspirées par l'idée qu'il faut rendre l'économie mondiale à la fois plus efficace et plus équitable [dans le but de] créer un climat international propice aux objectifs d'environnement et de développement". Mais sept ans plus tard, au sommet de Johannesbourg 2002 dont nous allons discuter page suivante, ces mêmes gouvernements constataient que l'humanité était "bloquée à un carrefour". Parmi les constats ils reconnaissaient que "l'écart toujours plus large entre le monde dit développé et celui dit en développement fait peser de lourdes menace sur la stabilité mondiale", que "les effets préjudiciables du changement climatique sont de plus en plus évidents et que "la pollution de l'air, de l'eau et du milieu marin continue de priver des millions d'individus d'une existence convenable"... En 2020, nous n'avons toujours pas beaucoup avancé; la fracture Nord-Sud continue à s'aggraver comme la fréquence des accidents écologiques. Les nations riches donnent l'impression de se refermer sur elles-mêmes, un sentiment accenté par les crises financière et économique que traversent les pays occidentaux, les obligeant à sauvegarder leur économie locale avant de penser aux autres... En d'autres termes, la santé de notre maman, la Terre, est préoccupante. Si nous voulons poursuivre un développement "durable" de l'humanité, équilibré, nous devons tous reconsidérer notre façon de vivre, prenant notamment en compte et de façon indissociable et sur le même plan, les aspects économiques, sociaux et environnementaux, sans oublier l'éthique. A la seule condition que tous les pays du monde agissent en faveur de ces processus d'entr'aide et de respect, notre maman à tous pourra être sauvée et regarder sereinement ses enfants grandir. Alors tous à bord du vaisseau Terre, il en va de notre avenir ! Prochain chapitre
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