BobSaintClar

Croa gazeuses...

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La nuit du 14 au 15 février, dans les Alpes, sur les hauts d’une vallée perchée à 1000 mètres d’altitude, quelques ami(e)s et moi-même avons bénéficié d’un ciel d’une stabilité exceptionnelle. Pour ne rien gâcher, nous disposions d’un matériel d’observation à la hauteur : Mewlon 250, dobson 300, dobson 600, tête bino. Gaz !

En début de soirée, le ciel n’est pas transparent mais légèrement voilé par des nuages d’altitude qui mettent nos nerfs au supplice. Je sors du gîte et m’approche prudemment de Mezzo, en pleine séance de lutte greco-romaine avec l’EM200 qui supporte sans problème apparent le Mewlon 250 (mais pas son propriétaire). Les jurons imagés dont le capitaine Haddock de l’astronomie française gratifie son matériel ne m’effraient qu’un instant et entre deux bordées incendiaires du maître, j’ose regarder dans l’oculaire : Saturne est ciselée, les bandes du disque nombreuses et contrastées, les anneaux sont nets avec une division de Cassini découpée au scalpel… une vision quasi-parfaite de la géante gazeuse qui prélude d’une folle soirée ! Dans la foulée, je tente d’apercevoir Encke, d’aucun l’ayant perçu dans des instruments comparables ; elle ne vient pas, et je sais désormais, compte tenu des conditions et de la qualité de l’image délivrée par le Mewlon, qu’elle m’échappera toujours à moins de 30 cm de diamètre…

Précisément celui du prochain tube gracieusement mis à ma disposition, le dobson 300 ES de David, un instrument connu et de tous ceux présents, mon préféré ! Je pointe Saturne sans attendre (tiens, il y a des à-coups, j’apprends que les axes ont été nettoyés au Pliz, mouaarrff pourquoi pas au Jex four tant qu’on y est) et l’astre errant paraît à nouveau sous ses plus beaux atours, aussi net qu’au Mewlon mais plus pêchu, plus lumineux, avec de jolies teintes pastels. Les détails des bandes montent jusqu’aux pôles, avec un assombrissement marqué. Les anneaux offrent une division supplémentaire, toute fine, surlignant la bordure extérieure... et cette fois, je n’ai pas à la chercher ! C’est la deuxième fois de ma vie d’observateur que je vois Encke sans le moindre doute, dans le même instrument qui plus est. Cette fois, en revanche, elle m’apparaît à plusieurs reprises, tant d’un coté que de l’autre. J’en profite longtemps, m’attardant à suivre son fil ténu le plus loin possible dans les anneaux.

Les orgasmes successifs des deux observateurs et de l’observatrice scotchés à la bino du T600 voisin m’incitent à pointer Jupiter, cible avouée de mes trois bruyants collègues. Par Touze, quel spectacle ! Au 300, dans les trous d’une turbulence déjà très limitée, la géante dévoile un fourmillement de détails qui génèrent un double sentiment de jouissance et de frustration mêlées : quelle beauté, quelle hallucinante floraison de tourbillons, de festons, de variations emboîtées comme dans des images fractales, de nuages ou que sais-je, on se fout des termes, avec des bandes équatoriales à l’aspect de millefeuilles, des subtilités jusqu’aux pôles… et vient la frustration : frustration d’être momentanément seul à voir ça, de ne le voir que sur des images de sondes, en plus plat, en plus impersonnel, en fausses couleurs, en différé, frustration de ne pouvoir le dessiner, trop de choses perçues et entr’aperçues, frustration de n’être pas cru…

Non sans mal, je délaisse le 300 et me fraye un accès jusqu’au T600, très courtisé. Le gros dob est revenu sur Saturne et m’offre un spectacle merveilleux, avec des couleurs et des contrastes amplifiés par rapport au 300. La division d’Encke est bien là, paradoxalement plus difficile à percevoir : j’ai des soucis avec la map sur la tête binoculaire, comme d’habitude… Décidément, le 300 est imbattable dans cet exercice.

Et Jupiter ? Foutrecul, quel festival ! L’accroissement drastique du contraste et du confort visuel décale mes perceptions, ce qui était deviné devient évident, les détails se figent et perdurent, les taches sombres et complexes qui entourent les bandes équatoriales acquièrent une belle teinte bleu-violacée, des points sombres constellent les abords des pôles… Je ne vois pas plus de choses qu’au 300, mais tout est facile, systématique, quasi-permanent. Pourquoi n’ai-je jamais vu ça dans une image webcam ? Tiens, il y a des satellites, des ch’tites boules de tailles et de luminosité variées, Callisto exhibe une zones claire qui ressemble à une calotte polaire… je vais me réveiller… David me dit quelque chose à propos d’un autre satellite mais je ne l’écoute pas, je reviens me perdre dans Jupiter, il faut que j’engrange un maximum d’images, les sangsues m’entourent et guettent quelque lassitude pour prendre ma place, arrière tas de parasites, je n’ai pas fini, lâchez-moi bordel au secours empaf…

Je retourne au T300. Enfer, Eta Carène est vissée dessus et ne le lâche pas ! Ce n’est qu’une fille, peut-être qu’en abusant de ma force physique je pourrais… non, elle se lève et s’éloigne en titubant, soûlée d’images dantesques, laminée, j’en profite illico et me rince l’œil jusqu’à m’en visser la géante gazeuse dans l’occiput et l’emmener dans la tombe…

J’ai besoin d’un café. Je retourne au gîte où d’autres devisent déjà sur ce qu’ils ont vu. Le temps fait son sinistre office, je ne me souviens pas d’une image, je crois m’en souvenir, je me souviens l’avoir vue, je me souviens m’en être souvenu… il faut faire un croa et d’ici là, décrire, à défaut d’écrire…

Je vais peut-être me remettre à l’imagerie, moi, finalement !

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Ce croa est un bijou. On regrette de n'avoir pas vu tout cela. Mais, en lisant ce compte-rendu, d'autres émerveillements reviennent en mémoire.
Que demander de plus ?

François

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Aaaaaahhhhhhh !

Quel CROA ! Et qu'est-ce que c'est bien raconté ! Je vous imagine très bien, vous querellant parce qu'un resquilleur a avancé d'une place dans la file d'attente, où s'est procuré un ticket au noir pour passer dans les premiers...

Bon, voilà, c'est un gros Dobson avec une optique parfaite qu'il me faut. Un jour... J'espère...

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OUUUURGHHHHHHHHH ! Un CROA ou l'on se bataille entre un 250, 300 et 600. Ben, meme si c'est payant, moi je m'inscrit tout de suite !.

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Raaahhh ! Super croa !

Je crois que les vernetoscopes ont encore fait de malheureuses victimes, ayons une pensée pour ces pauvres gens.

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Eh ben......
Quel CROA!!!!
Merci pour ces quelques minutes de rêve.

Au fait, le Mioumiou 250, il était complètement largué ou quoi ? Si j'ai bien compris il n'a pas intéressé grand monde cette nuit là.

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Largué ? Tu veux te faire plier par cap'taine Haddock ou quoi ?? "Saturne est ciselée, les bandes du disque nombreuses et contrastées, les anneaux sont nets avec une division de Cassini découpée au scalpel… une vision quasi-parfaite de la géante gazeuse ", écrivai-je ! Naaan, franchement, il était très bon... pour un 250

(Tiens , je lis qu'il y a un post sur un comparo Melon180 et FS128 ? Bin sur Saturne, avec Halfie, on a pas vu la différence...)

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Rah bob j'aurais voulu être là cette nuit là moa !!
En tout cas c'est bien raconté, mdr le passage avec Etacarina scotchée sur le scope !
Pis le passage "les sangsues m’entourent et guettent quelque lassitude pour prendre ma place, arrière tas de parasites, je n’ai pas fini, lâchez-moi bordel au secours empaf…" LOL =)!!

Pour le comparo fs128 µ180 on est plusieurs à ne pas avoir fait de différences. Un peu plus stable dans la FS. Sinon kif kif sur M42 et Saturne à grossissement égal.


@+!

------------------
Pour être heureux, nous pourrions apprendre à utiliser les choses et aimer les gens plutôt que d'aimer les choses et d'utiliser les gens.
- J. Powell

[Ce message a été modifié par HAlfie (Édité le 22-02-2004).]

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Dommage que Bob fusionne mal, car le 600 + Bino faisait vraiment le trou face au 300, tant en contraste qu'en résolution sur Jupiter et Saturne. Probablement une de mes plus belles nuits en planétaire depuis bien longtemps...
Pour le comparo FS128/Mewlon 180, j'ai préféré Saturne au Mewlon, un peu moins terne que dans la FS.

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Le mewlon 180 est meilleur que la 128... je le savais! Rire

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Oui, y en a qui ont fait le plein de géantes gazeuses le premier soir et qui ont dégazé le reste de la semaine!
Quant à moi, je suis comme Bob, la vision binoculaire est un plaisir qui m'est interdit
Je suis restée sur le dobson 250 où personne ne m'a disputé la place... Jupiter montrait déjà de belles plumes bleues entre les bandes équatoriales. Et les satellites étaient des billes de taille et de luminosité différentes.

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Moi j'ai compris. Mon futur instrument sera un dobson de 300/350mm ou rien!
Magnifique CROA en tout cas, on s'y croirait...

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Tiens, il me vient une suggestion qui pourra passer pour stupide, mais ça fait longtemps que je ne risque plus rien...

La voici : lorsque comme Maïcé ou moi, on a des problème de visualisation avec une tête bino, n'aurait-on pas interêt à n'utiliser que son oeil directeur dans l'un ou l'autre des oculaires ? Vous me direz qu'à ce stade, mieux vaut tout bonnement enlever la tête, mais ce n'est pas forcément très pratique lorsque d'autres (non handicapés) observent avec vous. Bref : quelqu'un a-t-il déjà essayé ? Je n'ai pas eu la présence d'esprit de le faire...

PS : Merci pour vos commentaires, tout le plaisir de ce croa est pour moi ! Bon, un petit mot sympa de Pedro m'aurait vraiment touché, mais on ne peut pas tout avoir

[Ce message a été modifié par BobSaintClar (Édité le 23-02-2004).]

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Aie Aie Aie, quel CROA......
Le jour où j'écrirais un "conte" comme celui-là, j'aurais 70 berges et les Dobsons 600 ne couteront que 100 Euros chez Unterlinden..........
Magnifique et tellement bien ra"conté"
Bravo
AstroTop

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A suggestion stupide, question stupide : c'est quoi ces problèmes de tête bino ? ça ne viendrait pas d'un dérèglement de la tête, auquel certains seraient plus sensibles que d'autres ? Avec des jumelles c'est pareil ?

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Non, avec des jumelles c'est pas pareil... La preuve, aussi bien Bob que moi, on rafolle des Canon 15x45 IS.
C'est juste que le relief d'oeil des oculaires mis sur la tête bino était peut-être un peu trop important que les réglages sont un peu plus ardus que sur les jumelles. A retenter avec d'autres oculaires et en prenant son temps pour les réglages, sans la pression des jeunes qui piaffaient d'impatience.

[Ce message a été modifié par Maïcé (Édité le 24-02-2004).]

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Rhaaaaa, il était où l'astronome de mes fs ?

[Ce message a été modifié par BobSaintClar (Édité le 24-02-2004).]

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Bon j'ai vérifié ...le mewlon 250 est extremmement sensible à la turbu externe !
Moralité : Je déconseille la soupe au chou !

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Pour moi, cette première soirée aura été la plus marquante. Saturne, déjà super dans tous les instruments (sourtout à la bino où on semblait la voir en relief, avec les satellites flottant autour), mais aussi et surtout Jupiter qui m'avait toujours un peu déçue jusque-là. Pour cette dernière, la richesse en circonvolutions gazeuses flanquerait un complexe d'infériorité à l'atmosphère d'un espace confiné où Bob et David auraient passé une semaine, livrés à eux-mêmes, avec des beignets avariés pour seule nourriture. C'est dire.

En tout cas Bob, tu n'aurais pas pu mieux décrire l'atmosphère de Juju. C'était effectivment indessinable (à la limite les variations d'albedo de Ganymède ou la calotte de Callisto, mais bon... ) et je n'ai pour l'instant vu aucune image webcam qui s'approchait de ce que j'ai vu, en matière de finesse de détails.

Nouveau challenge en vue pour le frérot de Ludiver ?

BCBC*

Matthieu

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